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Retour sur la deuxième édition bruxelloise du Festival Cinéma Interdit

Retour sur la deuxième édition bruxelloise du Festival Cinéma Interdit 1000 1477 Jean-Philippe Thiriart

En cette journée d’Halloween, nous avons choisi de vous parler… d’Horreur ! Et, pour ce faire, quoi de mieux que d’aborder le Cinéma Interdit, où le sang gicle avec abondance sur grand écran ?

La deuxième édition du jeune Festival Cinéma Interdit s’est tenue du 5 au 7 septembre derniers au cinéma Aventure, au centre de Bruxelles. L’événement est convivial, à taille humaine, avec un organisateur qui prend le temps d’introduire lui-même chaque film, d’interagir avec le public et de poser des questions à ses invités afin que les spectateurs profitent de leurs réponses. Ce fut par exemple le cas lors de la masterclass avec le réalisateur japonais Noboru Iguchi, qui a constitué l’un des moments forts de cette édition. La fréquentation était en hausse par rapport à l’an passé, ce qui est de bonne augure pour l’année prochaine. En Cinémascope était sur place et a tout vu, ou presque. Retour sur huit des neuf longs métrages qui y étaient projetés.

1978   ★★★
Luciano Onetti et Nicolás Onetti (Argentine / Nouvelle-Zélande)


Les frères Onetti, ces prolifiques cinéastes argentins, nous ont livré par le passé, tantôt en duo, tantôt en solo, plusieurs néo-giallos (Sonno Profondo, Francesca, Abrakadabra) et des films tels que What the Waters Left Behind et sa suite, entre autres. Comme l’indique son titre, l’histoire du présent film se déroule en 1978, année où l’Argentine, sous la coupe d’une dictature militaire, se retrouve contre les Pays-Bas en finale de la Coupe du monde de football. Alors que tous les yeux sont rivés sur ce match, un groupe de jeunes gens, accusé de dissidence, est kidnappé et torturé par une unité paramilitaire. En amenant dans leurs locaux ces personnes interrompues en pleine cérémonie satanique, les sbires du gouvernement commettent une terrible erreur… Si on ne peut pas dire que son scénario soit super bien écrit, ce film fait plaisir par la générosité dont il fait preuve, notamment en ce qui concerne le gore. Il mêle horreur humaine et horreur surnaturelle. La première partie est davantage réussie que la seconde, avec certains acteurs faisant très bien leur travail, mais l’ensemble est appréciable, à la condition cependant de prendre ce 1978 pour ce qu’il est : une pure série B d’horreur, et non un film qui aurait un grand discours sur le contexte historique qu’il met en scène.

Bark   ★★
Marc Schölermann (Allemagne)

Plus soft que les autres productions projetées dans le cadre de ce festival, ce thriller allemand met en scène un homme qui se réveille solidement attaché à un arbre en pleine forêt, sans se souvenir de pourquoi et de comment il est arrivé là. Le danger d’un tel postulat minimaliste est de rapidement lasser les spectateurs mais le réalisateur Marc Schölermann se montre suffisamment adroit pour éviter cet écueil. Le mystère de la raison de la captivité du personnage est bien entretenu. Entre ses tentatives hyper limitées pour assurer sa survie (par exemple, ouvrir la bouche pour récolter quelques gouttes quand la pluie tombe), les interactions avec un autre personnage, quelques visions qui brouillent les pistes ou encore un flash-back à la fin, il y a toujours un élément qui vient relancer l’attention du public. La réalisation est en totale adéquation avec son sujet, Schölermann filmant au plus près les éléments de la forêt – les gouttes de rosée, les fougères, les insectes, une mésange, etc. -, ce qui témoigne de son amour de la nature et confère une organicité bienvenue au film. Le tout est servi par une photographie idoine.

Cannibal Girl   ★
Noboru Iguchi (Japon)

Récent film de Noboru Iguchi, qui assume parfaitement son obsession des troubles liés au fait de manger et d’excréter, Cannibal Girl raconte la relation tordue qui se noue entre deux jeunes femmes partageant une même aversion pour l’ingurgitation d’aliments. Elles vont décider de se laisser mourir de faim ensemble, collées l’une à l’autre par une de leurs mains enduite de super glue. Leur envie va ensuite évoluer dans une direction qui justifiera le titre. Dans ce film, le cannibalisme n’est pas vu comme l’expression d’une barbarie sans nom comme dans les films italiens des années 70 et 80 sur ce thème (Cannibal Ferox notamment), mais comme l’expression du plus haut degré d’amour.
Dans la première partie, celle de la rencontre des deux filles aux abords d’un étang dans la campagne japonaise, Iguchi soigne la photo lors des gros plans sur les visages, soulignant surtout le caractère très mignon de celui de l’ex-idol Brazil, qui interprète le personnage de Yôko. Ce sera pour mieux nous surprendre par après quand celle-ci déformera son visage avec des grimaces fort peu rassurantes. Le réalisateur de The Machine Girl avait ici tout le potentiel pour signer un drame trash émouvant, mais il désamorce celui-ci en y adjoignant des touches de grotesque et de scatologie qui lui sont certes typiques, mais qu’il aurait gagné à réfréner dans ce cas-ci.

Hypertrophy Genitals Girl   ☆
Noboru Iguchi (Japon)

Le point de départ de ce film promettait un gros délire : deux étudiantes croisent la route d’un extraterrestre à la tête phallique qui les dote l’une d’un pénis géant et l’autre, d’un vagin surdimensionné. Elles partiront chacune de leur côté, tombant sur des gens qui voudront avoir des relations sexuelles avec elles, pas forcément consenties. Hélas, le résultat final est filmé platement, très mal rythmé, avec un montage manquant cruellement de dynamisme, et doté d’incohérences (la paire de seins de la première protagoniste qui est d’abord normale, puis hypertrophiée, avant de redevenir normale, sans raison apparente). La question du rythme est certes un problème récurrent dans les films pornographiques – car Hypertrophy Genitals Girl en est bel et bien un –, puisque leur visée est avant tout masturbatoire, mais malgré tout, il en existe des plus rythmés que cela. Point de sexploitation hardcore qui se laisserait suivre comme un film traditionnel, donc, point d’action délirante et effrénée mêlant sexe et gore, mais une succession de scènes de sexe bien trop étirées en longueur. Seul le début ainsi que la scène finale (unique scène gore) correspondent à ce qu’on pouvait en attendre. Une déception, donc.

Que ton règne vienne   ★★
Mathias Averty (France)


Que ton règne vienne est un documentaire suivant le parcours initiatique d’un artiste dans le milieu du satanisme en France. Se rendant en divers lieux stratégiques, de Nantes à Marseille, Mathias Averty interviewe des spécialistes et de simples adeptes afin de présenter différentes facettes du mouvement et de montrer la manière dont ces frater et soror perçoivent la figure de Satan et vivent leurs croyances. La fin montre une cérémonie célébrant le solstice d’été dans une grotte menée par un petit groupe de satanistes marseillais. Si le fil rouge est légèrement fictionnel, le reste est en revanche authentique. Bien structuré, ce film s’adresse aux personnes curieuses et ouvertes d’esprit. Il ne faut pas nécessairement être versé dans le sujet pour bien le suivre et l’apprécier. Le réalisateur et l’intervenant principal étaient présents lors de la séance, ce qui a permis un échange intéressant avec le public. Voilà un film qui a apporté une rafraîchissante diversité au sein de la sélection !

Street Trash   ★
Ryan Kruger (Afrique du Sud / États-Unis)


Variation sud-africaine du film culte de 1987, ce Street Trash-ci, qui date de l’année passée, était jusqu’à présent passé inaperçu. Sa programmation à Cinéma Interdit constituait donc une belle occasion de le découvrir.
Le maire de Cape Town, qui s’est mis en tête d’éradiquer les SDF qui prolifèrent dans « sa » ville, fait mettre au point un gaz à partir du fameux Viper, colporté par des drones qui sillonnent les bas-quartiers et ciblent les sans-abris. Le script suit une petite bande de déshérités qui va devoir lutter contre cette menace létale.
Les personnages principaux sont attachants et les effets gores, joyeusement répugnants, sont généreux et colorés, fidèles en cela à l’une des marques de fabrique du film original. Cependant, si au niveau des thèmes et des motifs, Street Trash 2024 cligne souvent de l’œil en direction du film de Jim Muro (les clochards, le Viper, la casse de voiture brièvement vue, les corps qui fondent et explosent…), on regrette le manque d’effort pour clarifier les liens entre les événements des deux films, posant la question du statut de celui-ci par rapport à son modèle (ni remake, ni suite directe…). Par ailleurs, sur le plan visuel, le rendu de l’image ne retrouve pas l’aspect crade qu’avait le premier. Bizarrement, alors que les limites budgétaires auraient pu (voire dû) constituer un atout, elles se font ressentir, notamment au niveau de la gestion des décors.
On peut d’ores et déjà affirmer que ce film n’aura jamais l’impact que son aîné a eu sur l’Histoire du cinéma gore.

Tales of Bliss and Heresy   ★★
Noboru Iguchi (Japon)


Cette deuxième édition s’est conclue en compagnie de Noboru Iguchi et de son Tales of Bliss and Heresy, film à sketches de 2023 composé de trois segments : Painful Shadows, sur le harcèlement au travail et le sado-masochisme, The One Armed Flower, qui est conçu par son réalisateur comme une suite tardive de The Machine Girl (le film-phare de sa filmographie) et The Table of Bataille, qui apparaît, quant à lui, comme une variation de Cannibal Girls. Noboru Iguchi y explore ses thèmes de prédilection et se fait plaisir en mettant en scènes différentes perversions. La dernière histoire va assez loin dans la scatologie en nous réservant une « surprise » qui a provoqué l’hilarité générale dans la salle. Un bon Iguchi, qui tisse des liens entre les différents sketches et avec d’autres films de sa filmographie, notamment via le retour de personnages. Les acteurs sont à la hauteur, la forme est soignée pour une petite production de cet acabit et on ne peut nier une certaine originalité dans le fond.

The Unsolved Love Hotel Murder Case Incident   ★
Guy, et Dave Jackson (Japon)


Ce found footage est un film japonais réalisé par deux Occidentaux vivant au Pays du Soleil Levant. Le premier, Guy, est l’auteur de The Sound of Summer et de plusieurs courts métrages, dont le très gore 2 Girls 1 Gut, projeté en début de séance. Le second a réalisé notamment le perturbant Cat Sick Blues.
Ici, les deux compères se mettent en scène eux-mêmes. Un soir, en discutant avec une amie barmaid, ils apprennent l’existence d’un sordide fait divers incluant une mort brutale et mystérieuse dans un love hotel. Cette affaire irrésolue les intrigue, au point qu’ils décident de mener leur enquête et finissent par se rendre sur les lieux du crime, embarquant avec eux leur amie.
Ce faux documentaire est fort court (1h10), mais la mise en place met proportionnellement beaucoup de temps. La partie où l’horreur arrive enfin frontalement est trop brève, ce qui crée un sentiment de frustration. Pour tout dire, vu le passif des réalisateurs et la mise en bouche qu’avait constitué 2 Girls 1 Gut, on s’attendait à plus extrême. L’effet de réel, particulièrement recherché dans cette catégorie de films, est cependant bien réussi. Il s’agit, en fin de compte, d’un film anecdotique.

Bref, des petits coup de cœur, quelques déceptions, mais toujours la même envie de découvrir et de partager des cinématographies qui sortent des sentiers battus, qui s’écartent des productions mainstream, tant dans le chef du programmateur que dans celui du public. On a déjà hâte de connaître ce que nous réservera la prochaine édition !

Par ailleurs, n’hésitez pas à découvrir notre retour, en dix critiques de films notamment, sur la première édition du Festival !

Sandy Foulon

Nos cotes
☆              Stérile
★              Optionnel
★★          Convaincant
★★★       Remarquable
★★★★    Impératif

Festival Cinéma Interdit : retour sur la première édition bruxelloise

Festival Cinéma Interdit : retour sur la première édition bruxelloise 2560 1449 Jean-Philippe Thiriart

Pour fêter dignement Halloween, En Cinémascope revêt ses oripeaux automnaux et sort de sa malle aux trésors non pas ses fausses toiles d’araignées et ses citrouilles évidées, mais carrément son compte-rendu du Festival Cinéma Interdit, gardé bien au chaud pour l’occasion. Cet événement culturel apparu récemment se révèle être le nouveau rendez-vous des amateurs de frissons d’horreur, de jaillissements inopinés d’hémoglobine et de sensations fortes. Or, quoi de mieux que de se (re)plonger dans l’Horreur la veille de Toussaint ?

Tout jeune festival organisé par le youtubeur et vidéaste Azz L’épouvantail, Cinéma Interdit a connu deux éditions à Paris, du 12 au 14 mai 2023 puis du 31 mai au 2 juin 2024, avant d’atterrir en Belgique – patrie de son créateur -, plus précisément à Bruxelles, au cinéma Aventure. Cette première édition bruxelloise s’est déroulée du 6 au 8 septembre dernier, attirant un public de passionnés avides de nouvelles découvertes.

Le but avoué de ce festival est d’y faire rayonner le cinéma d’horreur indépendant à tendance plus ou moins extrême qui a du mal à avoir de la visibilité. Le Japon était mis à l’honneur, avec pas moins de sept films qui en étaient originaires, sur les dix longs métrages que comptait la sélection, et trois invités venant tout droit de ce pays : le réalisateur Katsumi Sasaki, l’actrice Aya Takami et l’éditeur, distributeur, journaliste spécialisé et organisateur du Festival Gore Fest Hiroshi Egi.

Retour, par ordre alphabétique, sur chacun des dix films qui y étaient programmés.

Bakemono   ★
Doug Roos (Japon)


Bakemono est une production japonaise réalisée par un Américain vivant depuis des années au Pays du Soleil Levant. Le sujet du film étant l’influence négative de la ville de Tokyo sur ses habitants, traitée de manière horrifique, le regard que porte Roos sur cette cité est intéressant, car il s’agit du regard d’un étranger, mais connaissant bien ce dont il parle. Le film adopte une structure complètement éclatée. Il montre une multitude de personnes séjournant à des moments différents dans un petit appartement ne payant pas de mine loué via Airbnb. Le montage nous faisant passer sans cesse de l’un à l’autre. Malgré cela, quelques scènes sont trop tirées en longueur (notamment celle dans la minuscule salle de bain). Par ailleurs, vu le montage et le grand nombre de personnages, on a du mal à s’attacher à ceux-ci. Les effets gores, très nombreux et le monstre qui apparaît à tous les personnages comptent parmi les éléments positifs de ce petit budget. Intéressant dans son idée, mais perfectible dans son exécution.

Beaten to Death   ★★★
Sam Curtain (Australie)

Un petit couple prenant une mauvaise décision dans l’espoir de changer de vie, la campagne profonde australienne et des gens du terroir peu amènes : on connaît la chanson. Mais ici, le personnage principal s’en prend plein la gueule dès le tout début, pas d’introduction amenant le sujet en douceur, et ça n’arrêtera pour ainsi dire jamais. Le pourquoi du comment sera expliqué par flash-back. On souffre pour le héros, même si on ne peut s’empêcher de penser qu’il n’avait qu’à ne pas suivre un plan aussi foireux. Violent, le film nous fait aussi profiter des beaux paysages naturels de la région (il a été tourné en Tasmanie, pour être précis). L’acteur principal a dû fort s’investir dans son rôle (par exemple, sans même parler des maquillages sanguinolents qu’il porte tout du long, il a de nombreuses scènes où il ne voyait rien, ayant les yeux bandés). Un film hargneux, sans pitié, qui fait mal par où ça passe, et on aime ça ! Un des meilleurs films de la sélection.

Dick Dynamite: 1944   ★
Robbie Davidson (Royaume-Uni)


En 1944, les nazis décident d’envoyer sur New-York une grosse bombe contenant une substance transformant les gens en zombies. Dick Dynamite, grand dur à cuire tueur de nazis, est envoyé en mission afin de contrecarrer ce plan des Allemands, avec à ses côtés un petit commando composé de personnages hauts en couleur. Dick Dynamite: 1944 peut être décrit comme une sorte d’Inglorious Basterds version série Z. Robbie Davidson s’autorise tous les délires : on y croise des ninjas nazis, des cyborgs, un tireur d’élite zombie, etc. Le personnage principal renvoie aux héros musculeux des années 80, façon Arnold Schwarzenegger et le film adopte l’esprit bourrin qui en découle. N’ayons pas peur des mots : c’est con, mais relativement fun pour peu qu’on adhère au délire. Comme il est bourré d’action et bien rythmé, on n’a pas l’occasion de s’ennuyer. Par contre, la vulgarité systématique des dialogues devient vite lourde. On pourrait croire que ce micro-budget est une production américaine, mais non, étonnamment, c’est britannique. Un film dans l’esprit « grindhouse » à rapprocher des Iron Sky (mais en plus fauché) et autres Mad Heidi.

Eight Eyes   ★★
Austin Jennings (États-Unis / Serbie)

Ouvrant le Festival Cinéma Interdit le vendredi 6 septembre à 19 heures, Eight Eyes a fait fort bonne impression auprès du public. Cette coproduction américano-serbe (produite par l’éditeur Vinegar Syndrome et tournée en Serbie) est le premier film d’Austin Jennings. Il part d’un postulat proche de Hostel : un jeune couple passe sa lune de miel en ex-Yougoslavie quand il croise le chemin d’un gars du coin, qui leur propose un petit plan alternatif pour leur voyage… Dans cette partie, le suspense tient dans la question de savoir quand précisément l’homme s’en prendra au couple. On s’attend à tout moment à les voir se réveiller dans une cave glauque, enchaînés, prêts à se faire salement torturer. Ce ne sera pas très éloigné de ça, mais Jennings et son coscénariste ajoutent une dimension supplémentaire au scénario, qui lui fait aller dans une direction moins convenue. Un aspect mystique et psychédélique qui donne à Eight Eyes son originalité et qui expliquera ce titre un peu mystérieux.

Holy Mother   ★
Yoshihiro Nishimura (Japon)

Avant-dernier film en date de Yoshihiro Nishimura, grand nom du splatter délirant made in Japan, Holy Mother raconte comment une transsexuelle venue du futur et dotée de super pouvoirs vient au secours d’un gang de « gentils » yakuzas sino-japonais victimes d’un gang de vilains racistes. Quand Nishimura fait du cinéma « progressiste », cela donne un gros délire gore typique de son auteur. La formule ne change pas d’un iota. Femme aux quatre membres coupés servant de moyen de locomotion pour s’élever dans les airs grâce à la force des geysers de sang pulsant de ses moignons orientés vers le bas, créatures dont le haut est une femme et dont le bas est une grosse mâchoire à la dentition impressionnante (rappelant une mutation similaire vue dans Tokyo Gore Police), femme-nuage… L’excès de gore, de délire et d’humour pas fin est bien là. Malheureusement, ce film se situe en dessous de ce qu’a réalisé précédemment Nishimura. La formule commence à être usée, il recycle trop ce qu’il a déjà fait avant et cela apparaît plus bâclé, plus cheap. Donc moins impactant, mais totalement dans l’esprit de feu le label Sushi Typhoon.

Mukuro Trilogy   ★★★
Katsumi Sasaki (Japon)


Voici l’un des poids lourds de la programmation. Le réalisateur Katsumi Sasaki a réuni trois de ses courts-métrages (Apartment Inferno, Sweet Home Inferno et Just Like A Mother) en une anthologie gore qui a de quoi ravir les amateurs de cinéma japonais extrême. Femme séquestrée, violée, démembrée, découpée en petits morceaux, on a tout ça et même plus dans ces petites histoires. Le tout servi par des effets gores réalistes de grande qualité et des gros plans qui nous donnent le temps de savourer le travail effectué. Côté interprétation, chapeau à l’actrice Aya Takami, pourtant pas habituée à ce genre de productions, convaincante et fort investie dans son rôle. De plus, malgré le petit budget, on voit l’effort pour soigner la forme (notamment la photo). Il faut en outre souligner que ce n’est pas qu’un étalage de barbaque : non seulement il y a des histoires, mais il y a aussi une touche personnelle de l’auteur, un ton particulier. Même si tout ça est éprouvant, on en redemande ! Le genre de découvertes qu’on espérait faire à ce festival, donc mission accomplie !

Vermilion   ★★★
Daisuke Yamanouchi (Japon)

Il n’y avait pas que des films d’horreur projetés à Cinéma Interdit. Pour preuve, ce film érotique japonais (pinku eiga) fort efficace. C’est l’occasion de se rendre compte que Daisuke Yamanouchi, connu des amateurs de cinéma extrême pour ses deux Red Room (1999 et 2000) et Muzan-e (1999), est toujours actif, et même carrément très prolifique. Vermilion nous fait voir les relations extraconjugales d’un riche couple marié par pur intérêt, n’ayant pas de relations sexuelles entre eux. Elle s’amourache d’une jeune artiste peintre, lui entretient une relation avec leur domestique… De fil en aiguille, une vraie intrigue se tisse. Le film est très soigné, notamment sur le plan visuel. Entre les éclairages rouges (d’où le titre) et bleutés, on en prend plein les mirettes, sans compter que les corps nus et les ébats sont bien mis en valeur. Les scènes érotiques lesbiennes prennent une bonne place dans l’économie du récit. Yamanouchi est en mode soft, pas d’extrémités à la Muzan-e ici. Cependant, on peut lui faire confiance pour mettre en scène des paraphilies originales (voir par exemple le vieil homme qui récolte dans un verre la transpiration d’une jeune femme en nage afin de la boire voluptueusement). Une belle découverte dans le genre. C’est une bonne idée d’avoir programmé ce film : il a permis de varier agréablement les plaisirs.

Violator   ★★
Jun’Ichi Yamamoto (Japon)


Tout d’abord, il convient de préciser qu’il ne faut pas se fier au titre. En effet, le viol n’est pas l’élément central de ce film, celui-ci parle du phénomène du suicide collectif au Japon. Le réalisateur de Meatball Machine nous revenait en 2018 avec cette histoire qui lui avait été soumise à l’origine par un studio, mais qu’il a entièrement remaniée. Une jeune fille mène son enquête pour savoir ce qu’est devenue sa petite sœur portée disparue. Elle apprend que cette dernière est partie dans un minuscule village perdu au beau milieu de nulle part rejoindre d’autres jeunes dans le but de se suicider ensemble. Elle va se rendre sur place et découvrir les différentes personnes qui se trouvent là-bas. Violator donne l’impression bizarre qu’il y avait au départ un script sérieux, sur le sujet plombant évoqué, auquel Yamamoto a greffé de force des scènes délirantes très graphiques. En résulte un film qui semble avoir le cul entre deux chaises. Dans ce cas précis, on aurait préféré une approche sérieuse de bout en bout, même si, dans l’absolu, on n’est pas du tout contre les scènes déviantes aux effets gores « sushityphoonesques » proposées par Yamamoto.

Walking Woman   ★
Sôichi Umezawa (Japon)

Sôchi Umezawa est un maquilleur et spécialiste en effets spéciaux (il a travaillé sur des films tels que Alien vs. Ninja de Seiji Chiba, Tag et Prisoners of the Ghostland de Sion Sono) passé à la réalisation depuis 2014 et son segment pour l’anthologie horrifique The ABCs of Death 2. Walking Woman (également titré Walking Girl) est son tout dernier forfait en date, qui ne fait que débuter son parcours en festivals. Une femme bossant dans une agence immobilière souffre de problèmes de mémoire. Mais son sombre secret, impliquant des morts, va refaire surface suite aux visites récurrentes d’un homme sur son lieu de travail… Cette production japonaise se situe entre le drame et le thriller horrifique. Elle se caractérise par un rythme lent. Un petit potentiel scénaristique gâché par ses excès de lenteur, malheureusement. Restent quelques idées visuelles intéressantes et une interprétation tout en retenue d’Asuka Kurosawa (A Snake of June, Cold Fish, Psycho Goreman).

When You Wish Upon A Star   ★
Katsumi Sasaki (Japon)


Le film de clôture du festival était aussi la seconde séance consacrée au cinéaste Katsumi Sasaki, qui était toujours présent en compagnie de son actrice Aya Takami pour répondre aux questions du public. Une fille prénommée Eve, qui se prostitue, rencontre un jour la naïve Kimi, qui tombe elle-même dans les griffes de vils proxénètes. Cédant à ses noires pulsions, Eve se rend compte qu’après avoir découpé son « amie » en morceaux, cette dernière revient vivante et entière, comme si de rien n’était. Phantasmes morbides ou réalité ? When You Wish Upon A Star contient quelques scènes très gores dans le style de ce qu’on trouvait dans Mukuro Trilogy, mais celles-ci sont plus éparses, diluées dans un récit que Sasaki tire en longueur. Après le choc Mukuro, When You Wish Upon A Star déçoit, ne retrouvant pas l’intensité de l’anthologie gore. Qu’à cela ne tienne, le plaisir était aussi, et surtout, dans le fait même de pouvoir découvrir ce genre de films fous, rares, parfois déviants, dans un cadre particulièrement convivial.

Sandy Foulon

Nos cotes
☆              Stérile
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Crédit photo de la couverture de cet article : En Cinémascope – Sandy Foulon

En Cinemascope
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